Summer Palace (Une Jeunesse Chinoise - Yihe yuan)

Critique :

Voici la Chine comme on ne l'avait pas encore vue au cinéma.

Et comme il ne plaît pas aux autorités de là-bas qu'elle soit montrée, le réalisateur étant interdit de tournage en Chine pour cinq ans. C'est la Chine de la génération Tien An Men, celle qui voulut changer le monde en 1989. You Le, auteur du très prenant Suzhou river en 2000, ne s'attarde pas spécialement sur cette année. Mais elle fait partie de sa mémoire d'étudiant, comme de celle de ses héros dont on va suivre le parcours intime.

Summer Palace (Une jeunesse chinoise) raconte donc l'histoire d'une génération entre 1987 et 2003. Des étudiants qui dansent, rient, draguent, font l'amour, se disputent, scandent des slogans de démocratie et de liberté, marchent ensemble vers la place Tien An Men avec conscience et inconscience. Des jeunes qui apprennent la vie, l'amour, le sexe, le goût de la liberté, l'amitié, l'impuissance et les désillusions. Le film brasse avec sincérité, le quotidien estudiantin épris d'amour et de liberté, avec en toile de fond, les événements survenus à Pékin et dans le monde. You Le ne lâche jamais son fil rouge – le chaos sentimental et émotionnel – et saisit l'intérieur des choses.

La Chine n'est plus celle d'il y a dix ans. Mais en filmant une bande d'amis sur quinze ans, le réalisateur montre qui pouvaient être ces Chinois qui ont eu tant d'espoir en 1989, période romantique comme a pu l'être Mai 68. Il raconte une histoire à la « Je t'aime, moi non plus », balafrée par les chaos intérieurs et extérieurs. Prouve que lorsqu'on a commencé la marche vers la liberté, on ne peut plus revenir en arrière. Et montre que les chaos intérieurs sont plus difficiles à résoudre que les chaos extérieurs.

Soir en Ligne du 5/12/2007 par Fabienne Bradfer et Nicolas Crousse