It's a Free World

Critique :

Virée de son boulot de recruteuse de travailleurs immigrés, l'héroïne de «It's a Free World !» devient à son tour une exploiteuse cynique... Le meilleur Loach depuis «Ladybird»

(…) Les temps changent, mais à 71 ans Ken Loach semble retrouver toute son énergie et son punch, au point que «It's a Free World !» pourrait bien être sa réussite la plus éclatante depuis «Ladybird», qui lui aussi révélait une comédienne hors pair, la météorique Crissy Rock. Il faut souhaiter à la renversante Kierston Wareing, qui débute ici à l'écran, de vivre une autre carrière que celle de la première. Autour d'elle, comme toujours chez Loach, on croise des figures auxquelles il n'est pas besoin d'occuper longtemps l'écran pour marquer les mémoires, ce qui a toujours constitué une des qualités majeures du cinéaste. Et le scénario de Paul Laverty, le complice de Ken Loach depuis «Carla's Song», est très certainement le meilleur qu'ait jamais signé cet avocat spécialiste des droits de l'homme reconverti dans le cinéma.
La flamboyante Angie n'est ni victime ni bourreau, ou du moins pas davantage que tout un chacun. Elle se trouve simplement prise dans une logique qu'elle n'a d'autre choix que de faire sienne et qui la conduit à exploiter ceux auxquels la vie a offert encore moins de chances qu'à elle. Parce que ce monde est libre, ce qui pourrait bien signifier que chacun y fait, non ce qu'il veut, mais ce qu'il peut. Même s'il n'y a pas de raison d'être fier de cela, même si Angie pourrait bien y laisser sa peau. «It's a Free World !» est un grand Ken Loach. C'est la première bonne nouvelle de ce début d'année.

Le Nouvel Observateur du 3/01/2008 par Pascal Mérigeau