Mystères de Lisbonne

Critique :

Projet atypique, audacieux et risqué, Les mystères de Lisbonne est un des moments les plus intenses de cinéma, recelant dans chaque plan quelque chose d’inéluctable.

« J’avais quatorze ans et je ne savais pas qui j’étais. » Ainsi débute le nouveau film de Raoul Ruiz, adaptation d’un roman fleuve du Portugais Camilo Castelo Branco. S’ensuit un tourbillon d’aventures, de révélations, de passions violentes, de vengeances, d’amours contrariées et illégitimes dans un voyage mouvementé, au présent et dans les souvenirs, à travers le Portugal, la France, l’Italie et le Brésil à partir du Lisbonne du XIXe siècle, ville d’intrigues et d’identités cachées. S’y révèle une incroyable galerie de personnages, du faux curé à la femme fatale au brigand et à un pirate, qui vont influencer le destin d’un jeune orphelin en quête d’identité.

Projet atypique, audacieux et risqué, Les mystères de Lisbonne est un des moments les plus intenses de cinéma, recelant dans chaque plan quelque chose d’inéluctable. Hors format par sa durée (plus de quatre heures) et par son genre fabuleusement romanesque, ce film gigogne raffiné, drôle et passionnel autant que passionnant, Prix Louis-Delluc 2010, n’entre dans aucune case et pourtant les remplit toutes. A ce propos, Ruiz déclara : « Narratif, il ne l’est pas puisqu’il ne respecte ni les trois actes, ni les conflits centraux, ni la théorie de la volonté qu’implique la fabrication du cinéma américain “quelqu’un veut quelque chose”. Et il n’est pas expérimental non plus, il est un tout. Le film est construit selon un principe de plans-séquences qui intègrent d’autres plans que le spectateur imagine. » La fresque est d’une beauté infinie. Ruiz brouille subtilement les repères du temps, allège la densité du récit par l’humour et l’étrangeté, excelle en trouvailles ciné, use du plan large, côtoie la perfection et atteint quelque chose de majestueux. Tout est maîtrisé avec simplicité et sérénité. Pour info, le cinéaste chilien a aussi conçu une version télé de six heures.

Mad par Fabienne Bradfer

Dans Mystères de Lisbonne, tout est enchantement...

(...) Ne pas redouter la durée du film (4 h 30), ni le pedigree de son réalisateur, Raoul Ruiz, réputé pour être un cinéaste " difficile ". Dans Mystères de Lisbonne, tout est enchantement, délicieuses dérives fictionnelles, croyance absolue dans les vertus de l'imaginaire.

Le metteur en scène, dont c'est peut-être le meilleur film, invite à un vertigineux voyage dans l'histoire portugaise du XIXe siècle et, surtout, dans les identités fluctuantes de ses protagonistes. Avec un sens très sûr du romanesque et du surréalisme, Ruiz donne libre cours à son esprit feuilletonesque et signe un film inspiré du premier au dernier plan, à la fois cocasse et profond.

Les comédiens portugais sont tous excellents et leurs jeunes partenaires français (Clotilde Hesme, Léa Seydoux, Melvil Poupaud...) ont la bonne idée de les imiter. Une version télévisuelle de Mystères de Lisbonne (six épisodes d'une heure) sera diffusée prochainement sur Arte, mais, pour l'heure, la découverte sur grand écran de cette oeuvre atypique et ensorcelante s'impose deux fois plutôt qu'une !

par Le Point.fr

Autant de destins entremêlés avec un art du récit qui laisse admiratif.

Un film de quatre heures et demie, c'est une épreuve ou une révélation. Ô joie, « Mystères de Lisbonne » appartient à la deuxième catégorie!

Adapté de l'œuvre du Portugais Camilo Castelo Branco, ce film fleuve de Raoul Ruiz, renoue avec la grande et délicieuse tradition du roman-feuilleton. Le réalisateur d'origine chilienne nous transporte à Lisbonne au XIXe siècle, où l'on croise notamment un orphelin, une fille-mère mal mariée, un aventurier et un drôle de prêtre qui sait tout sur tout le monde… Autant de destins entremêlés avec un art du récit qui laisse admiratif. La beauté de la mise en scène, son ampleur, mais aussi son humour et son étrangeté captivent les amateurs de romanesque jusqu'au dénouement, bouleversant. Bravo!

par Le Parisien.fr